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Cyberharcèlement : comment y faire face ?

Réponse de Sébastien Gendre, association Action Innocence

Photo Sébastien Gendre

Parlez-nous des risques liés à l'utilisation d'Internet chez les jeunes ? 

Il existe un tiraillement entre l'avancée technologique, qui est incroyable et offre des possibilités infinies, et ce que l'humain en fait. Les jeunes, maintenant, sont constamment connectés, accèdent à Internet partout. Ils sont donc très largement touchés, bien plus qu'autrefois.

D'où vient cette envie des jeunes d'humilier leurs camarades ?

Il est difficile de définir la source. Souvent, c'est de l'opportunisme, quelqu'un est différent, sort de la norme, donc cela génère une réaction. Les enfants sont parfois cruels entre eux. Il y a aussi des phénomènes de répétition, lorsque le harcelé devient harceleur.

Comment faire stopper le cyberharcèlement lorsqu'on est victime ?

Il faut en parler, même si c'est compliqué de se confier car la personne est blessée dans son estime de soi et dans son intégrité psychique. En plus, il y a souvent la peur de potentielles représailles et d'être écarté du groupe. Tant que la personne garde cela secret, elle souffre. Donc la clé c'est d'en parler aux parents, aux professeurs, aux conseillers, aux médiateurs, à un adulte de confiance. Il n'y a rien qui justifie des comportements de harcèlement sur Internet. C'est interdit par le Code pénal.

Quelles sont les proportions de ce type de comportement ?

Le cyberbullying représente une petite partie du phénomène complet qu'est le harcèlement. Il touche entre 10 et 15 % des jeunes mais est extrêmement difficile à analyser. Les filles sont plus touchées que les garçons, de l'ordre du 60/40.

Quelles procédures légales une victime peut-elle engager ?

Pour les mineurs, l'intérêt est d'en parler afin de prendre des mesures et de se faire accompagner. Au niveau juridique, si on usurpe l'identité ou touche à la réputation, cela tombe sous la législation du Code pénal ou du Code civil. Mais il faut relativiser, parfois la simple prise de conscience ou des mesures internes suffisent. Lorsque c'est véritablement répété, il faut agir légalement, mais les procédures juridiques sont longues. Il faut commencer par de la médiation. Les ados se rendent alors compte qu'ils ont été trop loin.

Quelles mesures utilisez-vous pour prévenir les risques ? 

Nous ciblons les jeunes dès 9 ans et jusqu'à la fin de la scolarité obligatoire. Mais on fait aussi de la prévention pour les parents et les professionnels de la santé et du social. On utilise différents outils (spectacles interactifs, ateliers, etc.). Ils sont adaptés à tous les âges, de même que les pratiques des nouvelles technologies. Le cyberharcèlement est une thématique qui a pris de l'importance, mais elle est traitée au même titre que d'autres problématiques (cyberprédation, cyberdépendance, etc.).

Comment les jeunes réagissent-ils à cette prévention ?

Ils sont extrêmement concernés. Différents facteurs entrent en jeu. La prévention que nous faisons tourne autour de quatre axes principaux. Renforcer l'esprit critique de chaque individu. Travailler sur sa capacité à faire des choix, à prendre conscience de la portée de ses actes, y compris sur Internet. Il y aussi l'axe de la citoyenneté où le lien avec la loi est important, ils prennent conscience de ce qu'est une infraction. Finalement, il y a l'auto protection, savoir se protéger soi-même (des contenus qu'on publie...). Il y a une très grande participation de ces jeunes qui nous livrent leurs expériences, bonnes et mauvaises.

A-t-on constaté une amélioration ces dernières années en Suisse ?

Il y a un double phénomène. D'abord, le rajeunissement de l'utilisation et des pratiques. Les enfants sont maintenant « connectés » dès un très jeune âge. Ensuite, les problèmes surviennent sur une minorité d'ados, seule une infime partie dysfonctionne, mais cela fait tellement de bruit qu'on a l'impression que c'est une majorité. Le problème ne réside pas dans les outils mais dans ce que les gens en font. La clé est de considérer que les savoir-être sont au coeur de l'action, aussi bien pour les parents que pour les enfants. Mais plus le temps passe, plus on voit que les jeunes font des choix éclairés.

Où se situe la Suisse par rapport aux autres pays en matière de cyberharcèlement ?

Nous ne disposons pas de chiffres actualisés. Les cas sont souvent cachés, on ne peut donc pas les mesurer. Pour ma part, je pense que l'on n'est ni pire, ni mieux que les autres.
Il y a une étude récente, menée en Valais, par l'Institut Universitaire Kurt Bösch, portant sur un échantillon large d'élèves, qui révèle que la proportion d'écoliers victimes de harcèlement est de 5-10 %. La part d'élèves touchés par le cyberharcèlement est donc bien plus petite encore. Il serait aussi intéressant de faire des statistiques dans les autres cantons.

SH

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